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    Trafic de bébés : la filière bulgare

     

    Qu'est-ce qu'on ne ferait pas pour avoir un enfant ?

     

     

            Jean Galut a 83 ans et "110 ou 113 petits-enfants et arrière-petits-enfants", il ne sait plus exactement. Le grand-père, qui porte beau avec son costume rayé, sa large cravate à pois blancs et ses chaussures à talonnettes tressées bicolores, fait partie de la quarantaine de parents "acheteurs" poursuivis dans l'affaire des bébés bulgares jugée devant le tribunal correctionnel de Bobigny (Le Monde du 24 janvier). "Ce bébé, c'est le premier que j'achète ! C'était pour faire plaisir à ma petite-fille", s'exclame-t-il.

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    Au doyen des prévenus, entendu mercredi 24 janvier, la présidente Catherine Feyler-Sapene parle avec respect. "Je m'adresse à votre sagesse, monsieur (...). Pouvez-vous m'expliquer comment, quand on est gitan, on pense à faire un cadeau en achetant un enfant ? - C'est-à-dire qu'un jour j'ai vu passer devant la caravane des femmes qui parlaient gitan et qui disaient qu'elles voulaient vendre un bébé. Et moi, je les ai entendues. - C'est le hasard, donc ?, soupire la présidente - Oui, le hasard. - Et elles étaient bulgares ? - Je ne sais pas - Mais monsieur, comment peut-on acheter un bébé qui passe comme ça, devant sa caravane, la nuit ? - Ah non, il faisait jour !, corrige le vieux monsieur. - Bon. Et vous avez pris combien de temps pour l'acheter ? 5 minutes, 10 minutes ? - Oh, j'ai pas regardé. Mais vous savez, pour faire un commerce, ça dure pas des heures et des heures. J'étais d'accord sur le prix. - Et après ? - Après j'ai pris le bébé dans ma caravane, j'ai appelé mes petits-enfants et le lendemain, ils sont venus le chercher."

    Le bébé est une petite fille prénommée Cendrillon. Comme Ringo, Merveille et Michel-Platini, elle a rejoint la liste des vingt-trois enfants bulgares vendus à des familles de la communauté gitane française. La présidente feuillette un album photo. "C'est une vraie princesse", remarque-t-elle. "Oui, ce sera une chrétienne, cette gosse. Elle saura lire et écrire, dit le grand-père. Si elle avait grandi ailleurs, elle aurait peut-être eu faim, froid et elle aurait dû mendier la charité."

    "COMMANDE"

    Les parents adoptants, prévenus eux aussi, acquiescent. De leur union est née une première enfant, lourdement handicapée en raison de leur consanguinité. Depuis l'arrivée de Cendrillon, affirment-ils, la grande soeur a fait des progrès. "Et moi, maintenant, je fais Pâques et je fais Noël", ajoute fièrement le père.

    Cela fait déjà plusieurs minutes que dans le box, les quatre prévenus qui comparaissent détenus s'agitent. La présidente se tourne vers Tinka Georgiev, l'une des deux femmes bulgares considérées par l'accusation comme les organisatrices du trafic. Elle connaît bien le grand-père, raconte-t-elle. Il est venu "au moins une dizaine de fois" dans le camp d'Aubervilliers où elle était installée avec d'autres gitans, pour demander s'il n'y avait pas un bébé à vendre.

    Silencieuse jusqu'à présent, la voilà tout à coup qui reconnaît le trafic et admet être allée régulièrement en Bulgarie pour ramener en France des femmes enceintes à quelques semaines d'accoucher. Mais elle dit aussi que ces femmes venaient seulement "lorsqu'il y avait une commande". Son voisin de box, Abdel Galoul, un apprenti proxénète devenu le chef du camp d'Aubervilliers par sa liaison avec une prostituée bulgare, enchaîne : "C'est parce qu'il y avait des acheteurs qu'il y avait des vendeurs, madame la présidente." Lui aussi semble excédé. "Alors nous, on serait des bourreaux et eux des sauveurs de l'humanité ? Mais ils venaient au camp et ils demandaient des bébés comme on aurait demandé des chiens au chenil. Non mais, si ça continue comme ça, on va bientôt nous expliquer qu'il y avait des cigognes qui tournaient au-dessus des caravanes avec des bébés bulgares dans le bec !" "Mais alors, monsieur, vous nous racontez des histoires ?", dit la présidente en regardant le grand-père. Jean Galut hausse les épaules. "Ben oui, mais c'est parce que c'était trop long à vous expliquer, ma brave dame !"


     

    Pascale Robert-Diard
     

    Le code pénal et la "traite des êtres humains"

    Parmi les cinquante-six prévenus au procès des bébés bulgares, onze sont poursuivis du chef de "traite d'être humain commise à l'égard de plusieurs personnes". Ce délit a été institué par la loi du 18 mars 2003 sur la sécurité intérieure. "La traite des êtres humains est le fait, en échange d'une rémunération ou de tout autre avantage ou d'une promesse de rémunération ou d'avantage, de recruter une personne, de la transporter, de la transférer, de l'héberger ou de l'accueillir, pour la mettre à la disposition d'un tiers, même non identifié, afin soit de permettre la commission contre cette personne des infractions de proxénétisme, d'agression ou d'atteintes sexuelles, d'exploitation de la mendicité, de conditions de travail ou d'hébergement contraires à sa dignité, soit de contraindre cette personne à commettre tout crime ou délit." Lorsqu'il est commis à l'égard de plusieurs personnes ou de mineurs, avec violence ou contrainte, ce délit est puni de dix ans de prison et 1 500 000 euros d'amende. Il devient un crime, passible de vingt ans de réclusion criminelle et 3 millions d'euros d'amende lorsqu'il est commis en bande organisée. Les parents "acheteurs", poursuivis pour "provocation à l'abandon d'enfant né ou à naître" encourent six mois de prison et 15 000 euros d'amende.


     

    Article paru dans l'édition du 26.01.07 du Monde
     
     
    [...]
    L'adoption ? Là, ils sont unanimes : " Nous autres, gens du voyage, on peut même pas acheter un terrain ou adopter un chien à la SPA. Même la CMU [Couverture Maladie Universelle], c'est dur de l'avoir. Alors adopter un enfant... "
     
     
    Extrait de l'article de Pascale Égré pour Aujourd'hui en France en date du lundi 29 janvier 2007
     
     
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              Le quotidien "Aujourd'hui en France" fait sa une aujourd'hui, 19 octobre 2005 avec le titre très accrocheur "POURQUOI J'AI VENDU MON BÉBÉ".

    Des nouveaux-nés bulgares seraient vendus entre 5000 et 6000 euros via la communauté des gens du voyage.

    Misère humaine. Elle n'a malheureusement pas de limite.

    Dans ce quotidien, le témoignage d'une jeune mère soupçonnée d'avoir vendue sa fille.

    "Nous avons une vision très ethnocentrique de la situation. Chez les Tsiganes, le groupe protège l'enfant autant que ses parents. Il y a une conception de la famille très élargie." Un éducateur de rue qui travaille au contact des gens du voyage.

    "La communauté des gens du voyage est une communauté fermée, où l'on trouve beaucoup de stérilité à cause de la consanguinité entre cousins. Ce sont des gens qui n'ont pas accès aux circuits d'adoption traditionnels, qui n'ont quasiment aucune chance de satisfaire aux critères requis, et qui peuvent véritablement désespérer. C'est également une communauté où on vit avec de l'argent liquide, où l'on paye cash, où on s'entraide... Ils n'ont sans doute pas le sentiment d'avoir mal agi." Geneviève Delaisi de Parseval, psychanalyste, dans La Part de la mère, Odile Jacob éditeur ;

    Article de Florence Deguen.

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    Développement du dossier :

     

    Les causes :

    - Extrême pauvreté des Tsiganes  victimes de ségrégations, de persécutions et d'intolérance dans les anciens pays de l'Est en particulier.

     La misère qui règne dans les anciens pays de l'Est dans les minorités incite certains peu scrupuleux à partir faire du commerce crapuleux. Dans le cas qui nous intéresse, le réseau avait pour but la vente de bébé et une partie de l'argent allait dans ces pays payer des palaces pour certaines familles. En outre, chez les Tsiganes, le groupe protège l'enfant autant que ses parents. Il y a une conception de la famille très élargie.

     Voir le documentaire Rom Baro le grand chef tsigane qui montre la misère de cette communauté en Roumanie.

    - Très grande demande -désir d'enfants-, de personnes issues du voyage, Gitans ou autres.

     La consanguinité inhérente aux moeurs quasi autarcique de certains groupes et duquel résulte la stérilité y est pour beaucoup. Ces personnes, mal perçues socialement, ont peu de chance de voir aboutir leurs demandes d'adoption. De là découle une grande frustration et des gens prêts à enfreindre les interdits.

     

    Les scénarios, les faits :  2 cas possibles

    - Les jeunes femmes bulgares accouchaient sous leur propre identité, tandis que le père du couple acheteur allait en mairie reconnaître l'enfant.

    - Les jeunes femmes bulgares, souvent prostituées, se déclaraient à l'hôpital sous l'identité de la mère acheteuse. Ils étaient pour cela parfois "aidés" et escortés par des chefs de gang.

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    Précédents en Europe : en Italie, au Portugal, en Belgique ou une mère "porteuse" faisant monter les enchères sur Internet pour vendre son nourrisson avait fait scandale.

     

    L'avenir :

    - Les parents qui ont vendus leur enfant regrettent leur geste qui reste une fracture dans la famille. Ils ont le souhait et l'espoir de le revoir. Ce la est plus facile de nos jours avec les technologies évoluées de communication.

    - La priorité est donnée aux enfants et aux parents acheteurs, au cas par cas bien sûr.

    Pour l'instant, les bébés retrouvés sont tous en bonne santé. Les parents étant en garde à vue, les enfants ont été placés en famille d'accueil.

    "Les enfants n'ont pas à être punis de ce mensonge initial, de cette fraude sur l'identité. Leur intérêt est de ne pas êtr séparés de ceux qi leur portent affection depuis le début", réponse du président du tribunal pour enfants de Bobigny (19 octobre 2005).

    - La misère persiste et s'accentue. Le fossé ne cesse de se creuser entre riches et pauvres et l'imagination comme les voyageurs n'a pas de frontière.

     

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    Paroles d'espoir :

    "en Argentine, les enfants adoptés par les colonels qui avaient torturés leurs parents ont même, pour certains, choisi de leur pardonner."

     

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    Sources :

    La Nouvelle République du Centre-Ouest an date du 20/10/2005

    Aujourd'hui en France en date du 19/10/2005

    Des renseignements sur demande : http://filsduvent.oldiblog.com/?page=contact

     

    Liens :

    * Trafic d'enfants par des Bohémiens au XIXe siècle ou impression romantique ?

    * Vols, trafic, rapts d'enfants, les Bohémiens traditionnellement mis en cause 

    * L'adoption, administrativement difficile pour les Gens du voyage et autres Tsiganes

     

    * Aller vers un tout autre sujet sur les Gitans et populations nomades

    * Légendes qui courrent, rumeurs des lieux de vie : enlèvements pour prélèvements et trafic d'organes

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