• Circulaire N° NOR INT/D/07/00080/C Voyageurs : procédure de mise en demeure et d'’évacuation forcée

     

                 La loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance a modifié, par ses articles 27 et 28, les articles 9 et 9-1 de la loi du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage.
    En donnant la possibilité au préfet de procéder, après mise en demeure, à l'évacuation forcée des résidences mobiles en cas de stationnement illicite sans passer par le juge, elle accroît l'efficacité de l’action administrative et constitue une incitation supplémentaire pour les communes inscrites au schéma départemental d'accueil des gens du voyage à remplir leurs obligations en la matière.
    Cette procédure est strictement encadrée en vue de respecter les libertés publiques et les droits des intéressés...
     
    L'instruction qui suit en précise les modalités.
     
     
     
     
     
    RÉPUBLIQUE FRANCAISE
     

    Ministère de l'Intérieur et de l'aménagement du territoire

     

     

    DIRECTION DES LIBERTES PUBLIQUES                                                                    Paris, le 10 juillet 2007

    ET DES AFFAIRES JURIDIQUES

    SOUS-DIRECTION DES LIBERTES PUBLIQUES

    ET DE LA POLICE ADMINISTRATIVE

    Bureau des libertés publiques

     

    LE MINISTRE DE L’INTÉRIEUR, DE L’OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES

    A

    MONSIEUR LE PRÉFET DE POLICE

    MESSIEURS LES PRÉFETS DE RÉGION

    MESDAMES ET MESSIEURS LES PRÉFETS DE DÉPARTEMENT

     

    CIRCULAIRE N° NOR INT / D / 07 / 00080 / C

    OBJETGens du voyage : procédure de mise en demeure

                    et d’évacuation  forcée des occupants illicites d’un terrain.

    REF : 1) Articles 9 et 9-1 de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à

               l'habitat des gens du voyage modifiés par les articles 27 et 28 de la loi n° 2007-297 du

               5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance.

               2) Décret n° 2007-690 du 3 mai 2007 relatif à l’agrément prévu à l’article 9 de la loi

               du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage ;

               3)Décret n° 2007-1018 du 14 juin 2007 modifiant la partie réglementaire du code de

                justice administrative.

    La loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance a modifié, par ses articles 27 et 28, les articles 9 et 9-1 de la loi du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage.

    En donnant la possibilité au préfet de procéder, après mise en demeure, à l'évacuation forcée des résidences mobiles en cas de stationnement illicite sans passer par le juge, elle accroît l'efficacité de l’action administrative et constitue une incitation supplémentaire pour les communes inscrites au schéma départemental d'accueil des gens du voyage à remplir leurs obligations en la matière.

    Cette procédure est strictement encadrée en vue de respecter les libertés publiques et les droits des intéressés.

    La présente instruction en précise les modalités.

     

    1 Les communes bénéficiaires :

    Les communes bénéficiaires sont celles qui ont rempli leurs obligations légales en matière de stationnement des gens du voyage, ainsi que les communes de moins de 5000 habitants qui ne sont soumises à aucune obligation légale en la matière.

    Toutefois, sous certaines conditions, les communes qui ne satisfont pas encore à leurs obligations légales peuvent bénéficier de cette procédure pendant une période limitée.

    1.1 Les bénéficiaires à titre permanent :

    1.1.1 Les communes de plus de 5000 habitants inscrites au schéma départemental (article 1, alinéa 2 du II de la loi du 5 juillet 2000), y compris celles qui ont transféré cette compétence à un établissement public de coopération intercommunale (EPCI), qui ont satisfait à leurs obligations par l’aménagement et l’entretien d’aire(s).

    1.1.2 Les communes non inscrites au schéma départemental qui sont dotées d’une aire d’accueil.

    1.1.3 Les communes qui décident, sans y être tenues, de contribuer au financement d’une aired’accueil ou qui appartiennent à un groupement de communes qui s’est doté de compétences pour la mise en oeuvre du schéma départemental.

    1.1.4 Les communes visées à l’article 9-1 de la loi du 5 juillet 2000, c'est-à-dire les communes de moins de 5000 habitants non inscrites au schéma départemental et non mentionnées à l’article 9 de la même loi qui ne sont pas assujetties à des obligations de réalisation d’aire d’accueil des gens du voyage.

    1.2 Les bénéficiaires à titre temporaire :

    1.2.1 Les communes qui, sans avoir à ce jour satisfait à leurs obligations, bénéficient de la prorogation de deux ans prévue au III de l’article 2 de la loi du 5 juillet 2000 par la manifestation de la volonté de se conformer à leurs obligations.

    Le bénéfice du dispositif est ouvert jusqu’à l’expiration du délai supplémentaire de deux ans.

    1.2.2 Les communes qui disposent d’un emplacement provisoire agréé par le préfet. La notion d’emplacement provisoire a été créée par la loi du 5 mars 2007 et a été précisée par le décret n° 2007-690 du 3 mai 2007 publié au Journal officiel du 5 mai 2007.

    Vous vérifierez, dans le cadre de l’instruction du dossier de demande d’agrément d’un emplacement provisoire, que le terrain choisi par la commune répond aux conditions fixées par le décret. Sa capacité ne doit pas excéder trente emplacements de résidences mobiles.

    Il convient de s’assurer, également, que sa localisation garantit qu’il est accessible aux véhicules tractant une caravane et sa remorque. Le sol doit être stabilisé pour permettre leur stationnement. La surface du terrain doit être en adéquation avec le nombre de caravanes qu’il est susceptible d’accueillir.

    Rien ne s’oppose à ce que la commune sollicite l’agrément provisoire d’un terrain appartenant à un propriétaire privé. Dans cette hypothèse, la mise à disposition du terrain doit faire l’objet d’un engagement contractuel. De manière générale, l’emplacement désigné doit respecter la législation applicable en tenant compte de l’existence de sites inscrits ou classés sur le territoire de la commune.

    Vous veillerez à ce que les conditions d’hygiène et de sécurité requises soient réunies, conformément aux règles en vigueur. A cet égard, le terrain ne peut être choisi dans une zone classée à risque (inondable,…) ou dans un secteur protégé (captage des eaux,…). Il doit être pourvu de points d’alimentation en eau et en électricité en nombre suffisant par rapport à la capacité d’accueil du site.

    Il est nécessaire, également, de s’assurer de la régularité du ramassage des ordures ménagères.

    Vous avez la faculté de consulter la commission départementale des gens du voyage avant de prendre votre décision d’agréer l’emplacement qui vous est proposé. Enfin, vous notifierez votre décision d’agrément à la commune.

    Le bénéfice du dispositif est ouvert à compter de la date de cet agrément, pour la durée déterminéepar vos soins, dans la limite légale de 6 mois.

    Au terme du délai fixé par votre décision d’agrément, celui-ci perd ses effets. Si l’emplacement provisoire continue d’être mis à disposition des gens du voyage, la commune ne peut s’en prévaloir pour solliciter le bénéfice de la procédure administrative de mise en demeure.

     

    2 Les conditions de mise en oeuvre :

    2.1 La nécessité d’un arrêté d’interdiction du stationnement :

    La mise en oeuvre des dispositions de l’article 9 de la loi du 5 juillet 2000 est subordonnée à l’existence régulière dans la commune concernée d’un arrêté d’interdiction de stationnement en dehors des aires aménagées.

    Evidemment, cette condition ne s'applique pas aux communes qui sont dispensées de création d'une aire aménagée (communes de moins de 5000 habitants) et ne peuvent donc prendre un arrêté d’interdiction générale de stationnement sur leur territoire.

    2.2 Le risque d’atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques :

    Dès lors que vous aurez constaté que le stationnement illégal entraîne des risques d’atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques, vous serez en droit de décider une mise en demeure de quitter les lieux.

    Saisi d’une demande à cet effet, il vous appartient, avec le concours des services de la police nationale ou de la gendarmerie nationale, d’apprécier concrètement la nature et le niveau du risque. Ainsi, une demande du maire de la commune concernée fondée sur les nuisances occasionnées par un stationnement illicite de résidences mobiles et corroborée par un rapport de police pourra justifier votre intervention par une mise en demeure de quitter les lieux dans un délai qui sera fixé, au-delà des 24 heures prévues par la loi, en tenant compte de l’urgence de cette évacuation.

    Le risque d’atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques doit être apprécié concrètement dans chaque cas. Vous veillerez à la qualification des faits de nuisances énoncés à l’appui de la demande de mise en demeure dont vous serez saisi.

    2.3 Les cas d’exclusion prévus par la loi :

    Les exclusions déjà prévues par le III de l’article 9 de la loi du 5 juillet 2000 ne sont pas modifiées et continuent à s’appliquer au nouveau dispositif de la mise en demeure.

    Ces exclusions concernent trois hypothèses qui sont rappelées pour mémoire :

    - Lorsque les résidences mobiles appartiennent à des personnes qui sont propriétaires du terrain sur lequel elles stationnent.

    - Lorsque les personnes disposent d’une autorisation délivrée sur le fondement de l’article L 443- 1 du code de l’urbanisme (terrain de camping et parc résidentiel destiné à l’accueil d’habitations légères de loisirs).

    - Lorsque les personnes stationnent sur un terrain aménagé dans les conditions prévues à l’article L 443-3 du code de l’urbanisme (terrains familiaux spécialement aménagés pour les gens du voyage).

    2.4 Les dispositions particulières relatives à l’occupation d’un terrain privé affecté à une activité à caractère économique et qui entrave cette activité :

    Sont ainsi maintenues les dispositions du IV de l’article 9 de la loi du 5 juillet 2000 (saisine, par le propriétaire ou le titulaire d’un droit réel d’usage d’un terrain privé affecté à une activité à caractère économique, du président du TGI lorsque l’occupation de ce terrain, par des résidences mobiles, est de nature à entraver l’exercice de l’activité économique).

    3 Le mécanisme de la mise en demeure :

    3.1 - La notification de la mise en demeure : La mise en demeure fait l’objet de plusieurs mesures de publicité :

    3.1.1 Notification :

    La mise en demeure est notifiée aux occupants du terrain, par tous moyens. En l’état actuel de la jurisprudence administrative, le refus des occupants de recevoir notification du document relatif à la mise en demeure ne fait pas échec à la notification et à la régularité de la procédure.

    3.1.2 Affichage :

    Cet affichage est double : il s’effectue d’une part en mairie et d’autre part sur les lieux. Certains obstacles peuvent s’opposer au bon accomplissement de cet affichage sur les lieux, d’autant que rien ne permet d’assurer sa pérennité : ces difficultés pratiques ne devraient, en l’état actuel de la jurisprudence administrative, en rien fragiliser vos décisions.

    3.1.3 Notification supplémentaire selon les hypothèses :

    Dès lors que votre mise en demeure concerne un terrain n’appartenant, ni au domaine public, ni au domaine privé de la commune, vous devrez la notifier au propriétaire ou au titulaire du droit d’usage.

    3.2 Effets de l’opposition du propriétaire :

    Une fois le délai de la mise en demeure parvenu à son terme, le préfet peut procéder à l’évacuation forcée des résidences mobiles sous réserve que le propriétaire ou le titulaire du droit d’usage du terrain n’ait fait usage, dans cet intervalle, de son droit d’opposition prévu par le 4ème alinéa du II de

    5

    l’article 9 de la loi du 5 juillet 2000. Aucun formalisme n’est prescrit en la matière et cette opposition peut être effectuée par tous moyens : voie postale, télécopie, message électronique.

    Vous devez vous assurer de l’identité et de la qualité de la personne qui vous fait parvenir cette opposition.

    Vous devez également vous montrer vigilant quant à l’application des dispositions de l’article 16 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 aux termes desquelles il résulte que l’opposition peut être réalisée par voie postale dans le délai imparti par la mise en demeure, le cachet de la poste faisant foi, de sorte que l’opposition peut légalement vous parvenir, par voie postale, après le terme fixé par la mise en demeure.

    L’opposition du propriétaire ou du titulaire du droit d’usage ne saurait faire obstacle à l’exercice de votre mission de faire cesser le trouble à l’ordre public généré par l’occupation. C’est la raison pour laquelle les dispositions de la loi visent à contraindre le propriétaire qui s’oppose à l’exécution d’une mesure d’évacuation des résidences mobiles sises sur son terrain à prendre lui-même des mesures pour faire cesser les troubles. Vous pouvez le mettre en demeure dans un délai fixé par arrêté, sous peine d’une amende de 3750 euros.

     

    4 L’intervention du tribunal administratif :

    La mise en demeure est une décision administrative. Elle peut faire l’objet d’un recours devant le tribunal administratif avec la particularité, dérogatoire au droit commun, liée au caractère suspensif de ce recours.

    Le recours peut être effectué soit par les personnes visées par la mise en demeure soit par le propriétaire ou le titulaire du droit d’usage du terrain.

    Le législateur a créé un dispositif qui s’ajoute aux formes déjà existantes de référés et qui, dès lors, obéit aux règles qui lui sont propres. Ces règles sont précisées par le décret n° 2007 – 1018 du 14 juin 2007 qui crée les articles R 779-1 à R 779-8 du code de justice administrative. De plus, l’article R 811-10-1 de ce même code donne compétence aux préfets pour défendre ce contentieux en appel.

    Le délai de recours laissé aux occupants des terrains se confond avec celui de la mise en demeure de quitter les lieux. Ce délai, pour rappel, ne peut être inférieur à 24 heures.

    Dès qu’un recours est déposé, l’exécution de la mise en demeure est suspendue jusqu’à ce que le président du tribunal ou son délégué ait statué. Les dispositions de l’article 9 de la loi donnent un délai de 72 heures à la juridiction pour statuer. Le rejet de la requête vous permettra de mettre à exécution la mise en demeure.

    Les dispositions réglementaires précitées permettent au magistrat du tribunal de rendre sa décision à l’issue de l’audience et de la notifier sur le champ, afin qu’elle soit immédiatement exécutoire sans qu’il y ait besoin de délais pour la dactylographie des jugements ou pour leur notification.

    Si le tribunal annule votre mise en demeure, il conviendra d’analyser les motifs d’annulation pour étudier les suites à donner :

    �� Si l’annulation provient d’un vice de légalité externe : rien ne fait obstacle à ce que vous puissiez reprendre une mise en demeure, apurée du vice de légalité à l’origine de l’annulation.

    �� Si l’annulation provient d’un vice de légalité interne : vous ne pourrez, en principe, reprendre une mise en demeure, sauf si des circonstances de fait nouveau, apparues postérieurement à votre première mise en demeure, justifiaient une nouvelle décision.

     

    5 Les voies juridictionnelles de droit commun :

    Si les conditions légales de la mise en demeure suivie de l'évacuation forcée telles que décrites aux 1 et 2 de la présente circulaire ne sont pas remplies, vous pouvez rappeler à vos interlocuteurs que le départ des gens du voyage en stationnement irrégulier peut s'obtenir par les voies juridictionnelles de droit commun :

                 a) Si le terrain occupé appartient au domaine public, la personne morale propriétaire peut saisir le juge administratif des référés pour faire cesser cette occupation sans titre du domaine public, au titre de l’article L. 521-3 du code de justice administrative (référé « mesures utiles ») et dont les modalités ont été précisées par la décision de section du Conseil d’Etat n° 249880 « SARL Icomatex » du 16 mai 2003 (l’action doit présenter un caractère d’urgence et ne se heurter à aucune contestation sérieuse).

                  b) Si l’occupation sans titre porte sur une dépendance du domaine privé d’une personne publique, ce sont les tribunaux judiciaires qui doivent être saisis d’une demande d’expulsion, selon la procédure de droit commun, par la personne publique propriétaire. (sauf si les parties en litige sont liées par un contrat de droit public relatif à l’occupation de la dépendance domaniale, cas peu vraisemblable s’agissant de l’objet de cette circulaire).

                  c) Si l’occupation sans titre porte sur une dépendance de la voirie routière (ex : parcs de stationnement), la compétence pour prescrire l’expulsion appartient aux tribunaux judiciaires (Tribunal des conflits, 17 octobre 1988, commune de sainte Geneviève des Bois).

                  d) S’agissant, enfin, d’une occupation non autorisée de terrains relevant d’un régime de droit privé, le propriétaire du terrain ou le titulaire d’un droit d’usage peut saisir, par référé, le président du TGI.

     

    6 Dispositions de coordination :

    L’entrée en vigueur de ce nouveau dispositif rend sans objet les développements de la circulaire interministérielle Intérieur - Equipement, transports du 5 juillet 2001 contenus au titre VI - 1 paragraphe intitulé « les conséquences de l’arrêté municipal ») et au titre VI - 2.

    * *

    *

    A compter du mois d’octobre prochain, vous ferez régulièrement connaître le nombre des mises en demeure prononcées, ainsi que les suites données par le moyen du dispositif de suivi informatisé de l’application de la loi de prévention de la délinquance en cours d'élaboration par le secrétariat général du Comité interministériel de prévention de la délinquance (CIPD).

    Vous me saisirez, sous le présent timbre, des difficultés rencontrées dans l'application de la présente circulaire.

    Michèle ALLIOT-MARIE

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