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Italie et Roumanie en bisbille, les Roms en questions
La question rom, nouvelle frontière de lEurope ?Christian GODIN, Marc GOLDSCHMIT et Geneviève FRAISSEQUOTIDIEN :jeudi 8 novembre 2007 <script>loadNbReaction('NbOldReactions',curDocId);</script>Après plusieurs jours de tensions entre Bucarest et Rome, qui voulait expulser des milliers de Roumains dorigine rom, le président du Conseil italien, Romano Prodi, et son homologue roumain, Calin Tariceanu, ont lancé hier un appel commun pour calmer le jeu.
Quest-ce quun Rom ?
Il ny a sans doute pas eu, dans toute lHistoire, un peuple qui a été désigné par autant de noms différents, à lintérieur dune même langue : Gitans, Tsiganes, bohémiens, romanichels, Manouches, etc. Cette dispersion est en elle-même un symptôme : comment appeler un peuple si longtemps soupçonné de ne pas en être un, venant don ne sait où et qui, tout en allant nulle part, ne sétablit définitivement nulle part ? Ce trouble dans la langue est révélateur de celui où nous jettent ces gens sans Etat ni territoire, sans feu ni lieu, et, selon les préjugés séculaires, sans foi ni loi. Le nom de Rrom a été très récemment adopté par le Conseil mondial rom et les Nations unies, mais il nest pas reconnu par tous les groupes concernés. Les Roms sont une dizaine de millions dans le monde, la grande majorité vivant en Europe. On sait aujourdhui que leurs ancêtres viennent du nord-ouest de lInde, et quils en sont partis au Moyen Age. A la différence des Juifs, auxquels on a pu les comparer, ils nont pas gardé leur religion dorigine et ont adopté celle de leurs pays daccueil. La dispersion de ce «peuple» est sociale aussi bien que culturelle : il y a bien des différences entre un Tsigane roumain qui cherche à sinstaller en France ou en Italie et un Gitan dEspagne sédentarisé. Cela dit, les deux sont non seulement européens mais désormais membres à défaut dêtre pleinement citoyens ? de lUnion européenne.
Que révèle la question rom ?
Menant une existence quasi fantomatique, à lécart des villes européennes, dans les interstices de lurbain, les Roms sont une population à la limite du visible. Ils sont le révélateur paradoxal du caractère factice, et peut-être irréductible, de ces frontières «intérieures» à lEurope que sont les races, les nations, les classes, les masses. Inclassables dans les politiques nationales et européennes, ils doivent non seulement être protégés juridiquement (ils revendiquent un arrêt des expulsions, une régularisation de leur situation administrative, une insertion nécessaire à leur accès au travail salarié, un droit à lhébergement, aux soins, à la scolarisation), mais aussi apparaître activement sur la scène politique. Pour cela il importe de les soustraire à une double mythologie : celle dune population de nomades, vagabonds, un peu voleurs et très voyous, alors quils sont souvent sédentaires. Lautre préjugé est lidée quils incarneraient lessence ou la vérité de lEurope. Sils sont de «bons» Européens (par leur traversée des frontières nationales, leur plurilinguisme), ils portent en même temps lEurope au-delà delle-même et de ses frontières «externes», attestant par là du devenir mondial de lEurope.
Les Roms dans lEurope
Ils sont là, à la périphérie des villes. Hors du cercle de lEurope ? Tant que la Roumanie, pays de séjour de Roms sil en est, était au bord de lUnion européenne, le Rom venait dailleurs, «naturellement». Il ne vient plus dailleurs, mais il nest toujours pas dici ; cela, tout le monde sen rend compte. Périphérie des villes, périphérie de lUnion européenne : comment sen débarrasser, comment traiter des populations indociles ? Comment gommer les marges, où des citoyens de lUnion se tiennent ? Fausse image cependant : les Roms appartiennent à un Etat membre, on sen souvient quand il sagit de les expulser, plus exactement de les renvoyer. Fausse image parce que ces indésirables de lintérieur ressemblent aussi à lEuropéen dont rêve la Commission européenne. Mobile, aimant circuler, lEuropéen est invité à se déplacer au gré de ses études (vive Erasmus !) ou au gré de son emploi (ah ! les délocalisations, le chômage). Puisquil bouge, et bouge souvent, le Rom ressemble à lEuropéen. Il est à limage de lEuropéen. Il circule à lintérieur de nos frontières. Alors il nest plus à la périphérie de notre monde, de nos villes, de nos frontières, il est au centre, au centre de notre histoire. Dune catégorie sociale encombrante, il est désormais une figure centrale, osons dire universelle. Ironie de lhistoire ? Non, exercice de vision, perspective englobant les bords et la totalité.
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Liens :
* Un préjugé qui a la vie dure, le nomadisme des Roms : http://filsduvent.oldiblog.com/?page=lastarticle&id=540571
* Une idée reçue qui puise sa mythologie dans l'Histoire, les Tsiganes voleurs de poules : http://filsduvent.oldiblog.com/?page=lastarticle&id=276955
* Des noms différents pour un peuple disséminé, les Tsiganes : http://filsduvent.oldiblog.com/?page=lastarticle&id=420961
* la page suivante : la campagne Dosta contre les discriminations dont les Roms sont l'objet : http://filsduvent.oldiblog.com/?page=lastarticle&id=1612729
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