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Attila Jozsef dans la peau de l'ours
Montreur d'ours sur https://www.techno-science.net/ (Montreur d’ours à Luchon, France (photographie d’Eugène Trutat))
La Danse de l'ours
Bouclé, paré, dansant, pimpant,
Pattes de plomb, qu'il est fringant.
- Où donc traînes-tu tes pas ?
- Auprès des filles là-bas.
Brouma, brouma, broumadza.
Ma fourrure est noble et cossue,
Car mes vingt griffes l'ont cousue.
Peau de loup, de zibeline,
De chien, de martre, de fouine.
Brouma, brouma, broumadza.
J'ai trié la perle au printemps
Pour y trouver mes belles dents.
Les familles de neuf gosses
Voudraient bien d'un tel colosse.
Brouma, brouma, broumadza.
Bien lentement, je danse, exprès,
Pour qu'on me peigne mon portrait.
Les tifs de cette mégère
Comme pinceau pourrait faire.
Brouma, brouma, broumadza.
Bourgeois, qu'ils valsent vos gros sous,
Il valsera, lui, tout son soûl.
Cordon de bourse, à la danse,
Et l'ours marque la cadence.
Brouma, brouma, broumadza.
Rien sur terre n'est aussi beau
Que fleur de cuivre en ce plateau.
Monsieur hoche la caboche,
Les poings cousus à ses poches.
Brouma, brouma, broumadza.
La bête, seule, amuse à l'œil,
Mais lui, l'ours, il a son orgueil.
Si vos pieds gèlent par trop,
C'est un cercueil qu'il vous faut.
Brouma, brouma, broumadza.
Attila Jozsef 1905-1937, poète hongrois, collaborateur : L. Gara cité par Eugène Guillevic dans Mes poètes hongrois, 1967.
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